Destination : 169 , Ailleurs, c'est ici


Un petit coin de Dordogne

C’est un petit coin de Dordogne. Je n’y vais plus depuis des années. Mais je m’y revois comme si j’y étais.......

>



> ....... La route monte dans les bois pendant plusieurs kilomètres. Au bout d’un moment, on aperçoit sur la gauche au loin, un petit moulin qui tourne au gré du vent. Il se trouve dans le jardin de mon oncle et ma tante.

> En arrivant, on traverse une grande cour bordée de très vieilles maisons. Certaines sont inhabitées. Elles appartiennent toutes au «patron». C’est lui qui possède ce que mon oncle appelle «le domaine».

> Un portillon. Le sourire de ma tante. Celui, très large, de mon oncle.

> Une petite allée, le long de laquelle s’entassent des pierres et des cailloux de toutes les formes. Certains creusés par la mer il y a des millions d’années. D’autres façonnés par des hommes au temps de la Préhistoire. Je ramasse un biface qui a la bonne dimension pour ma main. Mon pouce trouve sa place exacte, à l’endroit où la pierre est restée brute. Eh oui, en labourant les champs, mon oncle découvre des silex taillés.

> Rencontres improbables d’un ouvrier agricole et de vestiges humains si lointains...





>

> Avec mon oncle, je pars pour une longue balade. Il me montre les traces que les chevreuils et les sangliers ont laissées dans la terre humide.

> C’est une région encore sauvage.





>

> Ma tante étend son linge derrière la maison. Là, la vue est unique. Pour moi, c’est l’une des plus belles du Monde. Prés en pente où broutent paisiblement les vaches. Vallons boisés à perte de vue. Petits villages, clochers au loin qui trouent les arbres. L’horizon est immense.

> Je pense que ma tante ne sait pas à quel point cet endroit est beau. Pour elle, rien de plus normal. Elle vit là depuis plus de trente ans.

> Depuis plus de trente ans, elle entend bramer les cerfs à la saison des amours.





>

> Je me réveille, je repousse les volets de la petite chambre au milieu de la vigne vierge.

> Je respire l’air qui tremble. J’écoute le chant si pur des oiseaux.

> Tout à l’heure, j’irai ramasser des châtaignes. Il suffit de faire quelques pas sur la petite route. Je peux marcher au milieu, on entend venir les voitures de loin.

> Ils me font des clins d’oeil, ces beaux fruits d’automne tout luisants dont je bourre mes poches.

> Le petit chien de la maison m’accompagne. Il peut ainsi me suivre pendant des heures, joyeux, confiant.

> Le soir, après avoir mangé, il va tout seul chercher son dessert dans la buanderie: une pomme de terre crue qu’il ramène dans sa panière, pour la croquer avec délices...

>





> Ma tante possède un potager. Je n’ai jamais vu d’aussi beaux légumes. Il faut dire qu’ils sont nourris de grand air et de soins constants. Avec une patience d’ange, ma tante enlève les petits cailloux qui pourraient gêner la pousse de ses carottes. Son persil dru vert rutilant est incomparable.

> Comme les œufs de ses quelques poules, d’ailleurs, qui ont le cœur orange...

> Le soir, je l’aide à tout désherber à la main. On entend les chouettes se réveiller dans les greniers des vieilles maisons abandonnées...

>





> Ce petit coin de Dordogne est mon paradis.

> Je m’y rends dès que j’ai quelques jours de liberté.





>

> ......... Des années ont passé. Mon oncle dort maintenant dans le petit cimetière du village.

> Ma tante est partie en maison de retraite. Le petit chien a lui aussi terminé sa vie.

> Le «patron» a vendu le «domaine». La maison a été transformée en gîte.

> Mais je ne suis pas triste. Chaque fois que nous nous revoyons ma tante et moi, nous partons en pensée revisiter ce petit coin de Dordogne.

> Il aura toujours pour moi une place privilégiée dans mon coeur.

>

Lilas