Destination : 157 , La route


Doggy Road

Samedi 02 juillet, 5h35 :

Ouah ! Que se passe-t-il ? C’est quoi tous ces va-et-vient ? Ils sont tombés sur la tête ?

Bon, moi je me recouche, hein ! On n’a pas idée de faire un tel raffut en pleine nuit !

….

Et voilà ! C’est fichu, je ne vais pas arriver à me rendormir … Alors, tant pis, je vais voir…

Tiens, le patron ! Il me voit même pas, les bras chargés de sacs …

Et la patronne, elle est marrante, couchée sur sa valise pour arriver à la fermer !

Bref, y’a que les petits qui dorment encore, je me demande comment ils font pour pas se réveiller !



6h05 :

Ouh là là !

Ça barde ! La patronne est pas contente : elle voulait partir à 6h pétantes !

Du coup, ils vont chercher Maël dans sa chambre, et ils l’installent en pyjama dans la voiture.

Maintenant c’est au tour du bébé d’être sorti de son lit à barreau et réinstallé aussitôt dans son siège-auto. Il ne s’est même pas réveillé ! Quand je pense au sketch qu’il fait à ses parents tous les soirs parce-qu’il n’arrive pas à trouver le sommeil, je me marre !



6h10 :

Ah ! Quand même, on daigne se souvenir de ma présence dans cette maison !

Quoi ? Un bol d’eau pour déjeuner ? Ils se moquent de moi !



6h15 :

Faut croire que non !

Me voilà moi aussi installé à l’arrière du véhicule, couché au pied des enfants avec l’interdiction de bouger pour pas les réveiller.

Bof, ça m’est égal, je crois que je vais moi aussi profiter du ronron du moteur pour roupiller un peu !



7h30 :

Ouah ! On s’arrête ! Ça va faire du bien de se dégourdir les pattes !

Ah ! J’ai enfin droit à mon petit-déjeuner, comme tout le monde d’ailleurs !



Allez, je vais faire un tour pour faire ce que vous pouvez pas faire à ma place ! Tiens, quel joli papillon ! Mais il se fiche de moi, à voler dans mes narines ? On va voir ce qu’on va voir … CLAC ! Loupé, mais j’ai pas dit mon dernier mot… Attends que je t’attrape, tu feras moins le malin !



8h45 :

Ouf ! J’ai pas réussi à le choper, ce papillon de malheur ! Je suis crevé, il m’a fait courir comme un fou ! Bon, je retrouve ma petite troupe et hop ! Un petit dodo dans la voit……ure… !!!... ???

MAIS OU ELLE EST CETTE P….N de Bagnole ! J’en suis sûr, elle était garée là, à cet endroit, je reconnais le banc et là, dans la poubelle, Pouah ! La couche du bébé, je connais son odeur par cœur !



9h15 :

Bon. Je dois me rendre à l’évidence, ils sont plus là. J’ai regardé partout, et rien. Nada !

Ils ont du se perdre … J’ai plus qu’une solution, partir à leur recherche !

Voyons, la voiture… elle a une odeur bien à elle que je reconnais à des kilomètres… même le patron, qui la bichonne pourtant, n’a jamais fait attention à son parfum … Comment il croit que je devine qu’il arrive : en lisant l’heure ? Ah ! Ces hommes… pas toujours très dégourdis !



12h40 :

Aïe ! Aïe ! Aïe ! Je commence à avoir mal aux pattes ! Je sais pas combien de kilomètres j’ai fait, mais ça fait un bail que je trottine maintenant ! Et puis je commence à avoir faim !

Eh ! Oh ! Mais il est malade celui-là, il a bien failli m’écraser avec son gros 4X4 ! Pourtant je reste bien sur le côté de la route, dans l’herbe, comme j’ai appris avec le patron ! Parce-que tous les dimanches, on part tous les deux faire un footing sur les petites routes…Moi j’adore ça ! Je cours à côté de lui, de temps en temps je fais une petite pointe de vitesse dans un champ, puis je reviens avec lui…



15h45 :

Tiens, une aire de pique-nique… Je vais faire un tour, peut-être je trouverais un petit quelque chose à manger… voyons cette famille, ils ont l’air sympa avec leurs trois marmots…

Aïe ! Ok, c’est bon je m’en vais… je vais pas vous mordre …

Allez, j’aime pas ça (sauf quand la patronne a fait des lasagnes la veille) mais je vais aller voir du côté des poubelles… Beurk ! un hamburger à moitié croqué … enfin, je vais pas faire la fine bouche … Voyons dans une autre … Mais je reconnais cette odeur ! Cette couche, là, c’est celle du bébé ! De MON bébé ! Je regarde partout mais je ne les vois pas...

La truffe collée au bitume, je fais le tour du parking. Ca y est, j’ai retrouvé leur trace : en avant toute !



18h35 :

J’en peux plus ! J’ai les coussinets en compote et la langue qui touche par terre !

J’ai fait je sais pas combien de bornes, traversé 2 ou 3 patelins et toujours rien en vue !

Dans le dernier village, y’a même eu un chien qui m’a dit de laisser tomber, que les patrons m’avaient surement abandonné parce-qu’ils voulaient plus de moi ! Il a même dit que chaque année c’est pareil, qu’il en croise toujours des comme moi…

C’est n’importe quoi ! D’abord il connait pas les patrons : jamais ils me feraient ça ! Ils m’adorent ! J’ai le même âge que Maël, je suis arrivé dans la maison juste après sa naissance.

D’accord, c’était pas prévu, ils ont accepté pour rendre service à mes premiers propriétaires qui n’avaient trouvé personne pour me placer. Comme c’étaient des amis, ils ont rien payé et je suis arrivée un matin dans ma nouvelle maison, un peu avant noël !

C’est vrai aussi que la petite boule de poil a bien grandi depuis : un labrador, c’est pas un yorkshire, mais quand même ! La maison est assez grande et j’ai mon panier au garage, et il y a même un jardin devant la porte pour que je puisse jouer avec le petit !

Et puis, je suis utile : je garde la maison la journée quand tout le monde est parti. Quoique, depuis l’arrivée du bébé, la patronne a arrêté de travailler et elle est souvent à la maison…



20h :

Je sais plus où aller… Je trouve plus l’odeur de la voiture et plus de couche du bébé…

Et si l’autre, là-bas, tout-à-l’heure, avait raison ?

Qu’est-ce qu’ils deviennent ces autres chiens dont il m’a parlé ?

20h30 :

J’en peux plus. Je me couche là, au pied d’un arbre, et je regarde passer les voitures.

Si j’étais un homme, je crois que je pleurerais…



21h40 :

Hein ! Quoi ? Qui m’appelle ? J’ai dû m’endormir, j’ai rêvé que le patron m’appelait !



Mais non, cette fois je ne rêve pas… De l’autre côté de la route, c’est la voiture, c’est lui !

Je me lève d’un bond et je cours le rejoindre …



« Ben mon Nigo (c’est mon nom, ils ont pas toujours de bonnes idées les humains), tu nous as fait une belle frayeur ! Heureusement que le voisin nous a parlé de ce chien noir qui marchait le long de la route ! Tu as fait 10 km de trop, et moi je t’ai cherché tout l’après-midi et j’allais repartir demain parce-que Maël, il en est malade de t’avoir perdu! Mais qu’est-ce qu’il t’a pris de te barrer ce matin ? On t’a appelé et jamais tu répondais. Il a bien fallu qu’on s’en aille… »



21h45 :

Je l’écoute plus.

Assis par terre du côté passager, j’ai les yeux à hauteur de la vitre et je regarde défiler la route que j’ai faite dans l’autre sens…

Nous voilà revenu au village. Tiens, voilà le chien de tout-à-l’heure. Quel abruti !



(Happy) End

Myriam