Destination : 305 , Personnage ex nihilo


Un bien étrange titre… Venant tout juste d’achever la lecture du roman de Michel Del Castillo « rue des Archives » je n’ai pu m’empêcher de me fixer coûte que coûte l’objectif de vous proposer une destination à partir de ce livre poignant.
Michel Del Castillo est un romancier brillant et reconnu depuis 1957 et la parution d’un premier roman assez autobiographique « Tanguy ». Dans ce premier livre il raconte le destin – son destin – tragique, d’un enfant abandonné qui connaîtra les camps de travail en Allemagne puis un camp de redressement tout aussi dur en Catalogne.
Le professeur me regarde écrire, par dessus mon épaule. Il me dit « tu sais que demain c’est la rentrée et que tu as encore pas mal de travail à faire ». Mais il sait que mon activité d’écriture est salutaire, tout comme le sport d’ailleurs. Il sait que cela lui fera du bien, qu’ensuite il pourra se concentrer sur son travail. Je fais comme si de rien n’était, je continue d’écrire avec bonheur ma destination.
Dans « Rue des Archives », Michel Del Castillo raconte comment il apprend la mort de sa mère et nous emmène chez elle, nous raconte petit à petit ses rapports difficiles avec celle qui l’a abandonné et aussi maltraité. Enfin quand je dis qu’il nous raconte, c’est là où je veux en venir, l’auteur utilise un procédé assez extra-ordinaire puisqu’il se dédouble.
Le prof sait que ces histoires d’enfances maltraitées me tiennent particulièrement à cœur pour des raisons qui remontent à la mienne d’enfance. Il a lui aussi consacré une partie de sa vie à aider ces enfants là, comme il a pu, comme il le peut encore.
Le procédé « merveilleux » utilisé par l’auteur consiste en l’irruption de l’enfant. L’enfant c’est un double de l’auteur, à côté de lui, qui a sa personnalité, qui vit à part et qui participe au récit de l’histoire. Le narrateur dialogue souvent avec l’enfant ce qui peut parfois nous perdre un peu, nous égarer mais qui nous permet de comprendre toute la sensibilité de cette histoire bouleversante. Je trouve très intéressant ce procédé qui consiste à inventer un personnage fictif pour participer au récit. Cela crée de la vie, du dialogue, permet de raconter avec plus de parole, de subjectivité, moins de description, plus de points de vue. Le procédé peut s’étendre au-delà du dédoublement du narrateur.
Le professeur fronce les sourcils, il me dit que je vais devoir m’expliquer, expliciter comme il dit. Il n’aime pas la joyeuse confusion, le brouillard que l’artiste écrivain aime produire.

En effet, un personnage peut naître d’un objet, d’un animal, d’une idée, qu’il convient alors de personnifier, auxquels un statut de personnage peut être conféré.

– Enfin ! clame la pendule. Je me demandais quand est-ce que j’allais intervenir ! Je te signale que depuis avant hier tu rumines cette destination et que tu hésites à la proposer. Je tiens à te dire que tu dois te dépêcher.
– Il a toujours eu du mal à aller au bout des choses, murmure le prof. Mais il finit toujours par faire ce qu’il a promis. Cela aussi n’est pas sans rapport avec son histoire.
– Bon, ça va, si vous ne faites qu’intervenir, je ne vais jamais la finir cette destination. En plus, elle risque de ne pas être claire du tout.
– Te te te ttt … tu as toujours manqué de confiance en toi, dit le prof, « François ».
– Bon, je crois que c’est parfait comme cela, dit calmement et mécaniquement l’horloge. Ils ont compris.

Bonne écriture,

- Jean
- François
- la Pendule

http://www.elle.fr/Personnalites/Michel-Del-Castillo bio de l’auteur

http://www.gallimard.fr/catalog/entretiens/01028866.htm l’auteur explique « rue des Archives ».

http://journals.openedition.org/rhei/3230 un lien vers un article universitaire intéressant (mais je vous conseille avant de connaître un petit peu l’oeuvre de Michel del Castillo )

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