Destination : 379 , Montagnes


Cherchant une idée féconde, j’en trouvais une puis une autre, il fallut décider, refusant de combiner les deux une nouvelle fois.
La première est histoire de montagne. Elle EST montagne. Dès que j’ai lu le résumé du nouveau livre de Sylvain Tesson « Blanc », l’évidence m’est apparue, la destination à venir serait celle de la montagne.
Je n’ai finalement pas trop compris quel était le récit proposé par Tesson, il me semble que son livre parle beaucoup de ski, qu’avec une bande de dandys, il arpente toutes les Alpes. J’en ai retenu des images de montagne, de ces régions encore sauvages de notre pays. J’espère que chacun parmi vous a un jour pu connaître le plaisir de grimper dans la montagne, que ce soit pour en gravir un bout, pour être saisi par son climat extrême, pour y découvrir sa faune et sa flore étagée.
La montagne ne peut vous laisser indifférent, elle se présente à vous selon les saisons sous différents visages que vous aimerez ou non. Elle ne se laisse pas facilement apprivoisée et sera impitoyable si vous n’en respectez pas ses codes, ses exigences (la quinzaine passée, un couple de randonneurs est mort de froid dans les Pyrénées espagnoles).
Toujours en Espagne, dans le massif au nord de Madrid, il a fallu se rendre à l’évidence : avec le réchauffement climatique les stations de skis sont devenues un gouffre énergétique doublé d’une aberration environnementale. Les Espagnols ont commencé à rendre cette montagne à la nature, ils l’ont débarrassée des horreurs mécaniques et métalliques qui la hérissaient. Il paraît que le tollé est grand là-bas, je trouve que ce genre d’initiative est nécessaire et courageux.
Il y a une infinité de choses que l’on peut écrire sur la montagne : une randonnée, un plat typique, une soirée étoilée (le ciel y est plus limpide), une rencontre avec un habitant de là-haut, humain ou non-humain. La montagne est un lieu de contraste, de polémiques, avec ses défenseurs, ses extrémistes, les pro-ours, les anti-loups, etc. J’aime la montagne parce qu’elle caricature les hommes qui viennent à sa rencontre : les humbles à pied, les ostentatoires en gros 4x4, les utopistes en communautés et les individualistes en appartement au pied des pistes.
La montagne, je ne sais pas pourquoi, les hommes, et plus les hommes que les femmes n’ont de cesse de vouloir la gravir, d’atteindre son sommet. Est-ce pour être au-dessus, contempler d’en haut, avoir un point de vue en altitude, est-ce pour se prouver quelque chose, réaliser une performance ?
Certains de mes amis me fatiguent à longueur de semaine avec des données chiffrées de leurs randonnées, trails, en kilomètres, en heures, en dénivelés positifs, en altitude… A quoi servent ces chiffres ? La montagne est pour moi une sensation, une expérience, un vécu, un moment de poésie saisissant, quelque chose qui me sort du temps et de la civilisation, un lieu où l’homme redevient petit, à sa taille réelle, débarrassé de ses artifices technologiques.

Enfin, la montagne ce n’est pas que la montagne physique, cela peut aussi être votre montagne métaphorique, celle du mythe de Sisyphe, que vous montez régulièrement et que pourtant il faut à chaque fois gravir à nouveau. Je ne la connais pas, elle peut être votre journée de travail, une maladie chronique, une phobie à affronter quotidiennement… racontez-nous.

Les autres pistes sont d’une évidence confondante : il s’agit des sentiers que vous choisirez d’emprunter pour écrire sur la montagne, avec votre vécu, votre sensibilité, votre imagination.

Comme l’a écrit Flaubert dans une lettre à Elise Colet : “La poésie est une plante libre ; elle croit là où on ne la sème pas. Le poète n'est pas autre chose que le botaniste patient qui gravit les montagnes pour aller la cueillir.”

Belle cueillette !
JFP

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