Destination : 394 , Météo !


Chez moi, on ne demande pas à quelqu’un comment il va, ce qu’il fait, on ne prend pas de ses nouvelles, enfin pas tout de suite. Non, la première chose sur laquelle il faut échanger, c’est sur le temps qu’il fait, et il fait toujours un temps étonnant, et quand ce n’est pas le cas, c’est encore plus étonnant. Bref, c’est de ces territoires ruraux où le ciel menace de vous tomber sur la tête, où l’orage annonce une fin du monde imminente.
Longtemps je me suis battu pour parler des sentiments, de mes soucis, des projets qui me tenaient à cœur, ne comprenant pas comment « la météo » pouvait être un sujet de la plus haute importance. C’était ignorer que si chez les aristocrates il y a une étiquette, chez les paysans il y a des rites, des préliminaires qu’il ne faut pas abréger.
Aujourd’hui, à l’heure d’internet, des smartphones relayant alertes météos et affichant cartes radar d’averses, la météo reste une préoccupation permanente donnant raison à mes ancêtres. Pire, ce sujet, couplé au souci écologique, se fraie une place en tête des inquiétudes des jeunes générations. Y aura-t-il une canicule cet été, souffrirons-nous de sécheresse, aurons-nous de l’eau potable en quantité suffisante, et j’en passe !

Le temps qu’il fait, la météo, le climat ont toujours joué selon moi des rôles importants dans les atmosphères de roman. Je crois même que les meilleurs romans savent créer une atmosphère météorologique à même d’intensifier l’expérience vécue par le lecteur. Prenons ici quelques exemples : « le soleil des Scorta », de Laurent Gaudé, prix Goncourt 2004, débute par une première page d’anthologie nous plongeant dans l’aridité brûlante d’un été dans les Pouilles, le décor est planté, le coup de soleil de la première page nous cuira longtemps derrière la nuque.*
Dans « Mémoire de mes putains tristes » ou encore dans « Chronique d’une mort annoncée », Garcia Marquez nous plonge constamment dans la moiteur des tropiques, notre pouls s’accélèrant chaque fois qu’il nous administre une bouffée de chaleur humide.
Pour changer de climat, Henning Mankell dans son ultime livre (« Sable mouvant ») nous prédit que des centaines de mètres de glace recouvriront le Nord de l’Europe (puis l’Europe entière) et que cela le préoccupe.**
Faites l’expérience : souvenez-vous d’un livre que vous avez trouvé excellent et tentez de retrouver l’atmosphère météorologique s’y rapportant. Vous verrez, c’est étonnant.

Pour cet atelier, voici la recette que je vous propose : choisissez un sentiment ou émotion. Prenez ensuite une atmosphère météo. Ajoutez un élément (de préférence naturel) et enfin choisissez une passion, un sport ou « hobby ».

Faites-le dans un premier temps, sans aller dans les exemples que je propose en fin de destination, exemples à consulter si vous n’avez rien de probant ou d’engageant. Avec ces éléments, c’est parti, vous pouvez écrire votre histoire, votre texte.

Bien sûr, il vous est possible d’écrire un texte 100 % météo ou un dialogue sur le temps qu’il fait, mais mes a priori de jeunesse me poussent à croire cela plus pauvre, moins intéressant qu’une belle petite nouvelle bien ficelée ! Montrez-moi que j’ai tort !

Allez, le temps se gâte,
il faut tenter d’écrire !

JFP

* http://www.google.fr/books/edition/Le_soleil_des_Scorta/zWGWG-YOVM4C?hl=fr&gbpv=1&pg=PT3&printsec=frontcover />
**
http://www.google.fr/books/edition/Sable_mouvant_Fragments_de_ma_vie/Jp94CgAAQBAJ?hl=fr&gbpv=1&printsec=frontcover

PS : pour aider si besoin, voici les corpus suivants à croiser entre eux.

Sentiments / émotions : peur, tristesse, stupeur, amour, compassion, culpabilité, honte, jalousie, frayeur, sympathie, gratitude…

Atmosphères météos : orage, sécheresse, moiteur, pluie, grêle, neige, grisaille, brouillard givrant, pluie fine, tempête, froid sec, pluie battante, chaleur extrême, soleil de plomb…

élément naturel : lac, ruisseau, rivière, forêt, bosquet, haie, étang, plage, océan,

hobby : voile, golf, philatélie, cuisine, bricolage, bonzaï, mime, théâtre, course à pied, judo, natation, échecs, pétanque, poésie, sculpture…

Au hasard, j’ai pioché : philatélie, rivière, sécheresse et culpabilité. Sans trop réfléchir, j’imagine un héros qui raconte à son petit fils (admiratif d’un timbre rare) comment il a obtenu ce timbre, grâce à une « arnaque » (raison pour laquelle il se sent coupable). Il y a une trentaine d’années il était « à l’armée » en Afrique. La rivière joue un rôle important, parce qu’elle est remontée en pirogue pour atteindre le village où se passe « l’arnaque ».

Laissez-vous porter !

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