Destination : 118 , Destination pressée


De temps à autre, au détour d’un livre dit de jeunesse, nous avons l’occasion pour notre plus grand plaisir de retomber en enfance. C’est ainsi que rencontrant dernièrement par hasard « les histoires pressées *» de Bernard Friot, je fus émerveillé par sa féroce drôlerie, ses démarrages détonants et la pertinence de ses histoires. Ce sont des histoires**, sortes de petites nouvelles d’enfance qui dépotent et tirent sur tout ce qui bouge : l’école, les parents, les dimanches où il ne se passe rien, etc…
Que faire de cela ? Rien de plus simple, je vous ai sélectionné (plus bas) des incipits*** de premier choix, il vous suffit de poursuivre… selon votre goût et de nous conter votre histoire pressée.

- Il était une fois un enfant qui ne croyait pas aux histoires.

- Tous les lundis c’est pareil. On a rédaction. « Racontez votre dimanche ».

- C’était un autobus. Enfin, pas vraiment, parce qu’il n’avait que deux roues.

- Je me suis réveillé, le cœur battant et les mains moites. La chose était là, sous mon lit, vivante et dangereuse.

- Un éléphant jouait tranquillement aux billes.

-Un jeune escargot qui partait en vacances rencontra en chemin une vieille tortue qui admirait le paysage.

- Ah, docteur ! gémit l’ogre, ça ne va vraiment pas fort.

- Sur un rayonnage de bibliothèque, un gros livre à couverture rouge demande très poliment à son voisin, un maigrichon plutôt pâle :

- C’est fini. Je ne mangerai plus jamais rien.

- Planète Mars, neuf heures du soir.

- J’ai douze ans mercredi prochain. Vraiment pas de quoi se réjouir.

- Je le sais, je le sais : mon père n’est pas mon père, ma mère n’est pas ma mère.

- Grand-mère n’aime pas les mouches. Moi, je n’aime pas grand-mère.

- Hier, j’ai rencontré quelqu’un d’un peu bizarre.

- J’ai tout de suite compris qu’il s’était passé quelque chose de grave.

- C’est vraiment ennuyeux de se lever, le matin, et de sortir de son lit pour toute une journée.

- Ca se passe dans une caravane. Mais pas en été. En novembre, plutôt, mais ce n’est pas vraiment important.

- J’ai rêvé que mon ventre se vidait, d’un coup, sur le trottoir devant l’école.

-
J’aurais pu encore en mettre des tonnes, mais voilà déjà de quoi vous amuser et nous régaler !

JFP



* http://www.editionsmilan.com/726e1489/Histoires-pressees.html# (sur le site de l’éditeur, on peut feuilleter le livre, mais c’est illisible !)

** une histoire pressée :



DEMAIN

Je vais mourir. Demain matin, juste après le petit-déjeuner, quand papa et maman seront partis, au moment d’aller à l’école.
C’est la seule solution. Je n’ai pas fait ma rédaction. J’ai déjà une semaine de retard. Le prof m’a dit que si je ne lui rendais pas mon devoir demain, j’aurais deux heures de colle. Et il m’enverra chez le directeur. Et le directeur convoquera mes parents. Et il leur dira pour le zéro en math. Et pour la signature que j’ai imitée sur le carnet de notes…
Alors, je n’ai pas le choix. Je vais mourir. Ils ne pourront plus rien me faire, après.
Ils seront bien embêtés. Ils diront : « C’est notre faute. » Et ils pleureront.
J’espère que ça ne fait pas mal, la mort. Ça doit être ennuyant, quand même : on
ne bouge pas, on ne fait rien, on trouve le temps long. Mais ça m’est égal. C’est
toujours mieux que ce qui m’attend à la maison, si…
J’espère aussi que ce n’est pas froid, la mort. Parce qu’il ne faudrait pas que je
tombe malade. Mercredi, j’ai un match de football et, sans moi dans les buts,
franchement, je ne vois pas comment les copains pourront se débrouiller.
Bernard Friot, Encore des Histoire pressées, Milan Poche




*** incipit : première phrase d’un texte. Ici, j’ai parfois étendu l’incipit.

lire les textes de la destination