Destination : 167 , Métamorphose


Le Pôle Intérieur





Médecin de formation, JLE abandonna très vite une profession qui n'aurait pas manqué de faire de lui pourtant un chaleureux médecin de campagne dans le Tarn, sa terre natale.

C'est ainsi que dans les années 1970, il se lança dans l'aventure, celle des mers et des Pôles, pour ne plus jamais la quitter.

Il croisa Eric Tabarly, Paul-Émile Victor, pour ne nommer que ceux-là.

En 1986, celui que l'on appellera plus tard le "marcheur du Pôle", se lancera en solitaire, dans une expédition alors jamais tentée, à savoir atteindre le Pôle Nord, seul et à ski.

Médiatisé (il s'en serait bien passé !), il ne cessera jusqu'à aujourd'hui, à travers ses voyages et ses traversées, de sensibiliser le monde, à la défense de l'environnement, mais aussi de délivrer aux Hommes,

ce message : "tout semble impossible, à qui n'a jamais essayé".



En 1987, il entrepris une autre "première", à savoir emmener 10 adolescents, motivés et entrainés pour rejoindre le Pôle Nord magnétique.



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Alors laissons là cet homme, ce médecin devenu explorateur pour évoquer désormais un de ces adolescents, qui ne savait pas encore en ce mois d'Avril 1987, que cette expédition allait non seulement bouleverser sa vie de collégien, mais et surtout l'amener à faire des choix déterminants dans sa vie d'adulte.



Stefan, 14 ans, fut donc à sa grande surprise, sélectionné.

Discret, pudique il garda pour lui ce trop plein d'émotions et de sensations que faisait naitre en lui la perspective de cette extraordinaire aventure qui, comme par miracle, lui "tombait dessus".

La presse, la télévision s'emparèrent de ce projet, unique, jusqu'alors.

Mais, Stefan préféra rester dans l'ombre, et ce n'est que contraint et forcé qu'il affronta les médias, avec ses camarades.



Stefan revint au bout de trois semaines d'aventure, d'exploration, de rencontres inespérées, de sensations intenses et grandioses. Un seul cahier n'avait pas suffit à son journal de bord...

Cheveux ébouriffés, son visage évoquait la force des vents, la banquise où l'horizon se fond; ses yeux, quant à eux, exprimaient l'éblouissement de l'extrême et la découverte d'une pureté presque mystique.



A bien le regarder, tout en lui avait le reflet d'un "enfant" qui était en train de prendre sa place dans l'équilibre du monde.



Ses parents l'accueillirent à L'aéroport de Roissy, et sa mère nota très vite qu'il était ailleurs; qu'il avait donc, en conclut-elle, non sans une certaine mélancolie , laissé "là-bas", un peu de lui-même. Et surtout qu'il en avait ramené un "autrement"...



Physiquement il était le même. Pourtant elle nota immédiatement un indicible changement, sans pouvoir le décrire.

Lui, l'introverti, le secret, exultait, riait, plaisantait, interpellait ses camarades, et tutoyait avec aisance et complicité celui que la jeune équipe d'adolescents avait pendant le voyage surnommé "Papy Pôle"...



La mère, attendrie, presque intimidée, hésitait entre admiration et nostalgie, face à un enfant devenu...adulte.



Il salua ses parents, sans effusions ni embrassades...Ne voulu pas qu'on l'on aide à porter ses sacs pourtant volumineux, et revint maintes fois sur ses pas, pour saluer ses camarades et embrasser les filles...

Ils allaient bien sûr se revoir bientôt et souvent mais c'est bien à Roissy, en ce jour d'Avril, qu'il fallait écrire le mot "fin" d'une histoire à nulle autre pareille...



La mère, elle, du se rendre à l'évidence : si le mot "fin"s'imposait, pour elle, il n'avait pas la même saveur.

Il était parti adolescent, à l'age donc où l'on est en quête d'indépendance et d'autonomie et c'est dans l'Arctique qu'il les avait trouvées...: il n'y aurait donc pas de "crise", et elle le regrettait presque.



Très vite, elle comprit qu'elle n'avait pas d'autre choix que de faire le deuil de cette complicité qu'elle avait toujours eue avec son fils.

Désormais elle l'écouterait plus qu'elle ne lui parlerait et le regarderait sans trop se faire remarquer.



Désormais, la mère qu'elle était (toujours...), devrait apprendre à "grandir" autrement, en instaurant spontanément une distance, avant que Stefan ne lui impose.









Martine V.